L’artiste nous revient avec un nouvel album qui est un hymne à la nature et à l’être humain. Mais ne croyez pas pour autant que toutes les chansons soient consensuelles. Ce serait mal connaître Jofroi. Au final, l’opus est superbe et varié tant musicalement que textuellement. Il est le fruit d’un auteur, compositeur et interprète qui jette un regard mature sur la vie qui passe.
Il est désormais lointain le temps où Jofroi commençait à arpenter les planches de Belgique avec ses « Coulonneux ». Pourtant, si l’esprit de ces années 1970 n’est pas absent de ce nouvel album, les 14 chansons qui le composent sont résolument ancrées dans le 21e siècle.
Et l’opus est riche. Riche de belles musiques, de bons textes et d’arrangements classieux servis par une excellente « prise de voix ».
Dès les premières notes, on sait que l’on entre dans l’univers musical de Jofroi. Mais on pénètre aussi dans son univers tout court : celui où il a choisi de vivre depuis des années déjà. Il nous présente ainsi « Cabiac sur terre », son coin de paradis. Cela fait mouche dans le coeur et bien mieux que n’importe quel dépliant touristique. Car le tourisme n’a que faire des sentiments et du vécu surtout quand il sont aussi profonds et honnêtes que ceux de l’artiste.
Du haut de sa soixantaine, Jofroi pose un regard sur notre époque et ses travers. Mais il jette aussi un coup d’oeil sur le passé. Question d’aborder, avec lucidité, un avenir somme toute assez limité dans le temps quoi qu’il arrive. Question aussi de transmettre le flambeau aux suivants comme on le ferait avec une délicieuse recette de « Pâte à gaufres »: en l’occurence une chanson hyper sensible sur le temps qui passe.
A l’heure qu’il est, Jofroi cerne sans doute un peu mieux la définition du bonheur. Il semble le trouver, finalement, dans les choses simples : vivre l’éveil de la nature à l’aube, aller « Jusqu’au bout de ses rêves », « Avec des si », ou être amoureux.
Et, tout naturellement, d’autres chansons témoignent de la difficulté à atteindre le bonheur absolu. Elles évoquent le progrès déshumanisant des nouvelles technologies (« Dire qu’on a marché sur la lune »). Ou encore les politiques humiliantes d’immigration : « Mais où vont les êtres humains que l’on reconduit aux frontières ? ». Ou enfin le pouvoir malsain des religions : « Quand je vois tout ce qu’on peut faire au nom de Dieu, je suis pas fier » (extrait de « Petit père »).
Trois chansons ne sont pas en totalité signées par Jofroi. Trois textes qui trouvent leur place d’une manière très naturelle et qui sont signés par les regrettés Félix Leclerc, François Béranger et Jean-Pierre Chabrol. Trois pièces qui contribuent magnifiquement à la diversité de cet album vraiment très réussi. Une oeuvre musicale élégamment habillée sur mesure (terme à utiliser dans le sens que l’on voudra) par Line Adam.
Les chansons de ce nouvel opus, « Cabiac sur Terre », sont à l’image de leur interprète : généreuses. A un point tel que l’une d’elles a pour titre « Variations sur le verbe donner » : tout un programme.
Jofroi sera très certainement près de chez vous un jour prochain. Alors, n’hésitez pas : allez l’applaudir sur scène où ses chansons prendront encore une autre dimension : celle de la maturité artistique.