Ai-je vraiment une excuse pour avoir loupé les deux albums précédents du duo Kaori ? Si ce n’est le plaisir d’avoir découvert, avec des oreilles vierges, le troisième opus des deux compères néo-calédoniens. Et de croire, de manière aussi naïve que prétentieuse, que ces musiciens hors pair étaient « Dans l’attente d’un signe » (c’est le titre de leur nouveau disque) de ma part…
Voilà qui est donc chose faite. Avec un plaisir extraordinaire. Car les onze titres (dont un instrumental) procurent d’abord le bonheur de l’écoute. Avant de faire réfléchir sur le sens des choses telles que nous les vivons trop souvent.
Dès la première chanson qui donne son titre à l’album (« Dans l’attente d’un signe » ), le ton est donné. Cette belle ballade nous parle de la foi inébranlable des artistes qui attendent, parfois très longtemps, la reconnaissance ou la gloire et qui finissent par se rendre compte que le succès n’est pas réellement une fin : « On vit en baladins, En saltimbanques joyeux, C’est si simple d’être heureux ». Et tout au long des neuf autres titres chantés, le duo nous présente une sorte de définition personnelle du bonheur de vivre.
Il est question de liberté dans cet hymne au vagabond sur une mélodie chaloupée (« Les chemins de la vie » ) ou le blues-rock « Tu donneras ton chèque » quand la liberté ne passe pas par l’argent.
Le plaisir de vivre se décline sur un rythme de bossa nova dans « Le ciel de mes rêves » et sur la ballade country « Forçat du plaisir » (Carpe diem).
L’importance des racines et de la réconciliation (thème brûlant en Nouvelle-Calédonie) sont évoqués dans « La parole des vieux » et « Se tendre la main » (pour dépasser le passé).
Quant à la femme, celle des îles ou d’ailleurs, elle est célébrée (« Femme ô femme » ) ou magnifiée au travers d’un amour éphémère (« Ma belle îlienne » ).
Enfin, il y a ce superbe hommage au sorcier-musicien de la « Rue Marquet » qui a réalisé et enregistré ce magnifique album avec la complicité de collègues formidables, « rêveurs nonchalants aux semelles de vent ». Sans le nommer dans la chanson, Lionel Gaillardin est ici remercié d’une façon très particulière. Il est loin le temps où ce multi-instrumentiste faisait ses premiers pas au sein du groupe mythique français « Il était une fois ». Aujourd’hui il est de ceux qui comptent dans les meilleures productions françaises grâce à son studio de Colombes : le Bonsaï. Et cet album de Kaori le prouve une fois de plus si besoin en était.
Qui est Kaori ?
C’est un duo composé de Thierry Folcher, chanteur-compositeur, et de Alexis Diawari, guitariste.
Amoureux des mots, Thierry Folcher a découvert, il y a une quinzaine d’années, qu’il était descendant de bagnard. Du coup, sa plume a été stimulée pour raconter des histoires où l’humain tient le premier rôle. Sur cet album il fait glisser sa voix et sa poésie solaire avec une force et une indolence qui évoquent James Taylor et les émois humanistes des premiers albums de Maxime Le Forestier.
Alexis Diawari, lui, a souvent secoué les habitudes de la tribu Kanak dans laquelle il a grandi. Quand il empoignait la guitare c’était pour jouer du blues, du reggae ou de la soul. Loin de la musique coutumière. Et c’est après avoir sillonné le Pacifique comme marin et pratiqué une multitude de métiers, qu’il savoure enfin le rêve de s’exprimer par la musique avec son complice d’évasion.
Délibérément ancrés dans la chanson francophone, Alexis Diawari et Thierry Folcher affirment leur engagement en faveur de la diversité culturelle et l’originalité créatrice.
Kaori sera en concert à Paris au Sunset le 14 novembre 2024.
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Article rédigé par Daniel Barbieux (Passion Chanson) sur base de l’écoute de l’album et des informations communiquées par Xavier Chezleprêtre (Attitude).
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